À tes pieds dans le désert
Quand, perché sur la dune de la douleur,
Ton regard pétrifié de statue de sel
Contemple le désert né d’un malheur,
Je m’enlarmes, m’éloigne du ciel.
A tes pieds, serpent maudit par le sort,
Je siffle ton nom mais en vain :
Si l’âme est là, l’amour est mort.
Il y a en enfer moins de mal que de bien.
J’ai été ébloui par quelque miroir,
Etourdi par des éoliennes de feu,
Ainsi t’ai-je mordu sans le vouloir
Et me suis-je découvert venimeux !
Comment inverser ta solitude, à présent ?
Que puis-je faire de plus qu’attendre là,
A tes pieds, dans l’aridité des sentiments ?
– Destin ! Comment as-tu pu permettre cela ?
Où dort ce temps qui jadis nous a vu
Danser sous les dattiers de l’amour ?
Dormira-t-il jusqu’à ce que soit revenu
Le Dieu-Lune en l’antique cité d’Our ?
Voudrait-il revenir habiter ces vestiges
Abandonnés aux djinns de la déflation ?
Sûrement non, ainsi que toi, poète prodige.
Certainement non, ma douce illumination…
J’ai vu bien des mirages depuis ces années,
Tous sont passés sous tes yeux cristalins ;
Si seulement l’un d’eux avait pu t’effleurer
Et tel un voile, se prendre dans ta main.
Si la seule étoile de nos cieux de pupille
Voulait bien sur toi jeter sa clarté divine,
Moi, lové contre la froideur de ta cheville,
J’accepterais à jamais ma peau vipérine.
Hélas ! la nuit t’avale dans sa gueule d’ampélite.
Sont absents les dieux et nulle magie n’opère.
Mais jour après nuit, caressant ta peau d’halite,
Je rêverai pour deux, à tes pieds dans le désert.
Texte issu du recueil « Billets d’âme – Tome 3 – Saison de cendres », à paraîte.

